HALLYDAY PASSION
Vous êtes sur le forum ' hallyday passion '
Le forum est ouvert à tous
S'inscrire c'est facile et rapide


Nombreuses rubriques
Mise à jour quotidienne



Admin07
-----------
HALLYDAY PASSION
Vous êtes sur le forum ' hallyday passion '
Le forum est ouvert à tous
S'inscrire c'est facile et rapide


Nombreuses rubriques
Mise à jour quotidienne



Admin07
-----------
HALLYDAY PASSION
Vous souhaitez réagir à ce message ? Créez un compte en quelques clics ou connectez-vous pour continuer.


HALLYDAY PASSION - FORUM DE DISCUSSION ENTRE FANS
 
AccueilAccueil  Dernières imagesDernières images  RechercherRechercher  S'enregistrerS'enregistrer  ConnexionConnexion  
' HALLYDAY PASSION ' FORUM DE DISCUSSION

 

 VHS - Agent secret

Aller en bas 
AuteurMessage
Admin07
Admin
Admin07



VHS - Agent secret Empty
MessageSujet: VHS - Agent secret   VHS - Agent secret Icon_minitimeLun 8 Nov - 14:22

[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]

Derrière la façade de son cinéma londonien, Carl Verloc agit en vérité pour le compte d’une organisation terroriste, sans que sa femme Sylvia ne soupçonne ses activités. Quand Scotland Yard le fait surveiller d’un peu trop près par son épicier de voisin, il se retrouve obligé de confier le transport d’une bombe à Steve, le petit frère de 12 ans de son épouse…




Alfred Hitchcock a toujours utilisé pendant sa carrière le film d’espionnage comme l’un de ses jardins de prédilection. Avec The 39 Steps et North by Northwest, deux de ses plus grands classiques, il utilise ce genre extrêmement codifié comme un arrière-plan inquiétant, un monde de manipulations diverses contre lesquelles un héros innocent doit se débattre. Ce personnage auquel le public pouvait aisément s’identifier était matière à présenter un récit parfaitement clarifié et suffisamment linéaire pour devenir de très gros succès populaires autant qu’un terrain de jeu aux obsessions du cinéaste. Pourtant Alfred Hitchcock fut constamment tenté d’aller au-delà de cette image trop "parfaite" du récit. A deux moments clé de sa carrière il a ainsi livré deux diptyques d’espionnages qui furent des échecs commerciaux, des oeuvres vues du côté des espions eux-mêmes et pas contre eux, où l’on suit allègrement des comploteurs, criminels et toutes sortes d’anti-héros possibles : Secret Agent / Sabotage et Torn Curtain / Topaz. Les deux films de sa fin de carrière sont deux objets souvent cyniques et détachés : Hitchcock ne peut plus s’exprimer comme naguère, alors il offre une sorte de cinéma à l’ancienne aigri qui propose quelques moments incroyables, intransigeants et méchants, qui sont totalement en dehors de la production du moment : ceux-ci feront l’objet d’un second texte intitulé "Espionnage et Déstructurations". Ici nous sommes davantage dans un cas "Espionnage et Expérimentations", car les deux films de la période anglaise étaient avant tout matière à faire la démonstration de toute la possibilité qu’avait le cinéaste d’exercer son art dans une noirceur extrême ou une totale liberté de ton. A revoir ces deux œuvres quelque peu passées de mode cinéphilique aujourd’hui, on redécouvre un cinéaste encore en formation mais capable de dégager de la puissance et de la modernité à l’état brut comme peut-être il ne le refera plus souvent dans la suite de sa carrière.


Masques et déguisements, décors et simulacres







[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]Les Quatre de l’espionnage au grand complet…

Première simulation de Secret Agent : la mort de son personnage principal, le fameux Mr Ashenden de Somerset Maugham dont Hitchcock adapte ici très librement les nouvelles… Après une parodie d’enterrement, un officier manchot se dépatouille avec un cercueil vide, image d’absurde totale. Quand Ashenden entre en scène, c’est sous les traits de John Gielgud, acteur shakespearien mythique peu à son aise ici, assez fade et finalement le anti-héros parfait de cette mascarade complète. Le concept d’Hitchcock est simple : Ashenden est un être distant, un peu lâche, qui doit se charger de la base besogne d’éliminer un agent allemand, mais en ne se salissant jamais. Accompagné par "Le Mexicain" Peter Lorre (qui se grime totalement dans une composition complètement extravagante) il est la "tête pensante" tandis que l’autre exécute. Madeleine Caroll au milieu apporte une certaine insouciance, elle croit jouer véritablement à un jeu futile au départ et s’amuse du faux couple qu’elle va former avec Ashenden. Robert Young, le plus charismatique et la star américaine du film, se voit quant à lui offrir le rôle du méchant traître en contre-emploi total. Hitchcock aime la séduction et celle qui se trouve la plus chargée d’érotisme est tout le jeu qui a lieu entre Young et Madeleine Caroll… Mais contrairement aux 39 Marches, la séduction n’est pas intrinsèque au divertissement de l’action mais une arme supplémentaire de manipulation. La scène du faux baiser dans le train des 39 Marches est d’ailleurs "remaké" en clin d’œil final de la relation entre les deux personnages. Entre le début et la fin du film, tout ce quatuor aura changé son image initiale hormis Peter Lorre. La capacité des sociétés à créer ce genre de personnages est finalement ce qu’il y a de plus effrayant…




Les lieux et les espaces sont aussi des artifices : ce qu’ils renferment n’ont rien à voir avec leurs apparences premières et ce qu’ils devraient évoquer de prime abord. Dans Secret Agent, une église et un orgue sont associés à un cadavre et à un crime macabre, une usine de chocolat fait figure de nid d’espions et la pureté de la neige et du blanc montagneux devient le théâtre d’un meurtre… Hitchcock donne à une série de vignettes une connotation tout à la fois expressionniste, abstraite et presque surréaliste, avec une bonne place réservée dans ce film à l’absurde. La Suisse ici est un terrain propice à l’étrange : pays de la neutralité, tout n’y est aussi peut-être plus naturellement que spectacle et décor.




[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]La fabrique de chocolat suisse dans Secret Agent.

Dans Sabotage, les lieux sont tout autant inhabituels. Tout d’abord le cinéma vu comme le repère du terroriste Verloc. Le spectacle et la distraction du public cachent en réalité une activité toute autre… Matière pour Hitchcock à ironiser sur son propre statut d’amuseur des foules. C’est d’autant plus troublant quand l’on sait qu’il jouera de l’exploitation de cette image jusqu’à foison par la suite, alors qu’ici il la retourne, la déstructure, la critique allègrement. Oscar Homolka/Verloc fait mine d’aller acheter un film, et parle de meurtres ou d’histoires d’amour pour satisfaire ses différents publics… Amusant d’autant qu’en adaptant ici Joseph Conrad, Hitchcock choisit justement d’y adjoindre une love story pour en atténuer la noirceur et impliquer le spectateur : la réplique prend une toute autre dimension. Une des rares mises en abyme d’horreur de son cinéma est aussi présente lorsqu’une fenêtre s’ouvre dans le salon de Verloc au son d’un cri strident qui est celui du film de sa salle de cinéma et qui pourrait venir d’une de ses oeuvres : un faux meurtre pour le (futur) maître du suspens. Est-ce que le refus public massif de cette vision radicale et distanciée l’a par la suite incité à adopter un autre comportement ? Dans un autre sens le cinéma dans Sabotage est aussi pour l’héroïne Sylvia une exaltation des illusions qu’elle a sur son mari, son couple, sa situation :

" Tout au long du film, nous avons réalisé que Sylvia Verloc vivait dans un monde d’illusion. L’illusion que son mari est un homme bon, qu’il s’occupe bien de son petit frère Stevie, et que le mariage repose sur un contrat équitable. Quand le cinéma explose, effaçant toute trace des causes réelles de la mort de Verloc, le rêve s’écroule. Sylvia Verloc vivra désormais les yeux grands ouverts. " *(1)


[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]Epicerie, cinéma, aquarium, zoo, animalerie… une série de façades (Sabotages).


Le Cinéma n’est pas le seul lieu dont Alfred Hitchcock retourne l’apparence dans ce film. On retrouve aussi l’aquarium d’un zoo, théâtre de manigances, et également la boutique d’un vendeur d’oiseaux qui n’est autre qu’un complice de Verloc. Il faut noter qu’en général les oiseaux ont ici un rôle particulièrement notable, on les retrouve métaphoriquement dans la fameuse sentence "Don't forget the Birds will sing at 1:45" et concrètement très souvent au détour de plusieurs plans: ils sont par exemple également dans l'animalerie et le salon des Verloc, dans une cage, juste avant la scène du couteau. Les héros du petit film Disney que l’on voit sont aussi ces oiseaux à priori innocents, et la chanson "Who killed cock Robin ?" (qui a tué le petit rouge-gorge) est entonnée. Presque trente ans plus tard, Hitch réalisera The Birds… En tout cas ce qu’il faut relever c’est comment le cinéaste montre que tout cet univers de boutiques n’est que façades et apparences, le sort des choses se joue véritablement en cachette dans les coulisses. La préparation de l’anarchie se trame derrière une société bien rangée. Même Ted, l’épicier voisin des Verloc, est lui aussi impliqué dans un système de duplicité puisqu’il espionne pour le compte de Scotland Yard.

Dans les deux cas, les personnages féminins vont incarner une conscience et une culpabilité. Quand les illusions s’effacent, le pessimisme s’installe.

Coupables et innocents, gravité contre légèreté


Secret Agent et Sabotage sont les deux parfaits miroirs de toute la noirceur au sein du cinéma d’Alfred Hitchcock, souvent atténuée par ce désir absolu du metteur en scène de vouloir répondre aux attentes du public (attitude qui a poussé le maître à souvent renier plus ou moins ses échecs au box-office, ces deux œuvres comprises). Hanté par la figure de l’innocent pris dans un engrenage qui le dépasse (dont on a fait de la peur de la police du petit Hitch l’origine traumatique toute désignée), il la pousse ici jusqu’à sa destruction même et son élimination sèche et sans fioriture. Une fin brutale, le plus souvent la conséquence d’une erreur, d’une méprise affreuse dans un plan et une règle du jeu trop bien rôdés qui pourtant déraillent. Un révélateur de la réelle teneur du sentiment de culpabilité, de la part humaine et monstrueuse en chacun, qui se charge de faire voler en éclat les "masques" vus précédemment.





[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]Madeleine Caroll et Sylvia Sidney : le regard féminin interroge la part d’humanité face à l’horreur.

Madeleine Caroll et Sylvia Sidney : le regard féminin interroge la part d’humanité face à l’horreur.
Dans Secret Agent, une césure très nette va se mettre en lumière quand une confusion va aboutir à l’exécution en montagne d’un homme qui n’avait absolument rien à voir avec l’agent Allemand recherché. Les personnages d’Ashenden et Elsa vont avoir du mal à s’en remettre, plus particulièrement cette dernière qui est un peu comme la conscience même du groupe dans son entier : avant même de savoir si la personne tuée est véritablement la bonne, c’est celle qui se remet le moins du crime, incarnant par là aussi la part la moins exprimée de cette même culpabilité chez les deux autres hommes. C’est la signification de ce travelling d’une grande force sur Madeleine Caroll et son regard tragiquement fixe, lorsqu’elle est attablée entre ses deux "partenaires" de jeux. Par la suite elle dévisage Ashenden qui fait tout pour échapper à son regard. Lorsqu’arrive le message contenant le très hitchcockien terme "Wrong Man", le rire de Peter Lorre fait office de cataclysme supplémentaire. Ce dernier à partir de ce moment restera "le Mexicain", une véritable bête à tuer, déshumanisée… Tandis qu’Elsa ne peut que se lever et se retirer. Elle va avouer à Ashenden son amour profond et son coup de foudre comme un besoin de vérité. Hitchcock lie l’histoire d’amour entre les deux personnages non pas comme une romance mais comme passage obligé, d’abord, parce que Ashenden y reste toujours aussi passif et que cette passion n’a rien de cinégénique ou d’érotique : elle est surtout pour les deux héros leur dernière chance d’apparaître vrais dans un monde du faux, comme un idéal de rédemption en somme.



Dans Sabotage, la mort d’un enfant est somme toute une limite extrême pour les basses besognes et ceux qui sont, pour leur cause (ici très floue), amenés à commettre des actes de terrorisme. Brian De Palma dans Scarface et Steven Spielberg dans Munich ont encore récemment tout deux repris le principe du suspens sur la mort possible d’enfants pour justement figurer un "point de non retour" chez leurs personnages. Hitchcock est plus cruel, puisque ici la bombe explose sans que justement le terroriste, totalement hors film à cet instant, ne puisse contrôler la situation qui n’est autre que le destin implacable. Une différence avec Ashenden qui à l’aide d'une longue vue était le voyeur des actes qu’il exécutait à distance via "le Mexicain".





[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]Plus de place pour la légèreté...

Secret Agent et Sabotage sont des films qui se remarquent par leur volonté de ne pas forcément correspondre aux attentes du spectateur en matière de récit : il s’agit de bousculer ouvertement les codes et la logique. Le monde de l’espionnage vu de l’intérieur étant comme nous l’avons vu celui des apparences, c’est également une notion qui prend forme au niveau de la narration. Secret Agent est ainsi à ce jour sans doute le film d’Alfred Hitchcock où s’exprime les plus violentes ruptures de ton. Débutant par une scène d’introduction qui tient de l’absurde absolu avec le faux enterrement d’Ashenden (son manchot, ses cadrages obliques et son cercueil vide), le film se poursuit sur la voie du divertissement léger entre la performance comique de Peter Lorre et l’espèce de vaudeville qui se noue entre les vrais et faux Mr et Mrs Ashenden… jusqu’au meurtre de l’innocent. Sabotage quant à lui prend le risque d’offrir au public la scène la plus intense et traumatisante aux deux tiers du métrage… Claude Chabrol sur son commentaire du film sur le DVD Zone 2 cherche à le souligner comme une faiblesse pour la dernière partie : il est vrai que dramatiquement il n’offre guerre d’autre perspective à son public abasourdi que de se remettre d’un choc (la mort de l’enfant) dans une intrigue qui en elle-même est condamnée au tragique. Hitchcock traite d’un sujet plein de gravité issu d’une adaptation littéraire, ce que l’ouvrage Chabrol/Rohmer lui a clairement reproché, traitant même le film d’académique ! Hitchcock adaptant Conrad, la nouvelle vague lui reproche de la solennité, un manque de divertissement et de trivialité dans l’intrigue, comme s’il n’avait pas le droit de traiter de front un aspect purement dramatique, de se lancer à corps perdu dans son versant le plus sombre. Film qui débute par une gigantesque coupure de courant, une plongée initiale dans l’obscurité, Sabotage prenait le parti d’être fondamentalement déprimant. Hitchcock essaye bien d’y instaurer une romance et un happy-end mais le personnage de Ted, la taupe de Scotland Yard amoureux de l’héroïne, est fade au possible pour faire contrepoids et rendre malgré tout le public un tant soit peu optimiste. Scène radicale et emblématique, la projection d’un dessin animé de Walt Disney qui sous les rires du public prend un ton tragique pour Sylvia : il n’y a plus de place pour la légèreté après la mort d’un enfant, ce petit spectacle n’a plus d’autre sens que celui de la duperie… On ne s’amuse que tant qu’on est inconscient. Sabotage va constamment en ce sens contre l’idée même de divertissement.





La puissance du montage : les rails du destin



Dans ces deux œuvres anglaises, le montage devient l’un des instruments préférés d’Alfred Hitchcock pour jouer l’implacabilité de ses intrigues. Nous allons retenir quatre séquences particulièrement notables.







  • La mort de Caypor (Secret Agent)

Voici l’un des plus beaux exemples de montage parallèle dans le cinéma d’Hitch : ayant identifié dans un casino un individu, Caypor, qu’ils prennent pour l’espion qu’ils doivent éliminer, Ashenden et "Le Mexicain" organisent son "effacement" à la faveur d’une sortie en montagne. Les fils du téléphériques figurent la longue avancée vers la mort de Caypor dans la même cabine que ses bourreaux. Ashenden mal à l’aise va toutefois préférer se retirer et observer, à la longue vue, le drame en train de se jouer. Avant Rear Window, Hitchcock introduit déjà dans son œuvre avec une grande force la figure du voyeur. Le paysage panoramique donnant sur un décor de montagne totalement artificiel renforce l’impuissance du personnage qui regarde de bout en bout une fiction qu’il a mis en scène, sans avoir prise sur ses actes. N’oublions pas que Ashenden est tout autant un écrivain qu’un espion : dans un certain sens, il visite ces actes horribles sans prendre réellement conscience de leur réalité, du moins il fait tout pour ne pas y baigner directement. Vis-à-vis de ce rapport au réel, dans Secret Agent, on retrouve en effet très souvent la beauté poétique de ces décors de cartons, toiles peintes et maquettes habituel du cinéma de l’auteur et particulièrement dans sa période anglaise, qui offre à ces images un pouvoir d’abstraction assez sensationnel.

[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]
Si entre le voyeur et l’exécuteur, on évolue déjà dans deux dimensions différentes, Hitch lui en offre une troisième en rythmant la séquence sur ce qu’il se passe au niveau d’Elsa, restée à l’arrière à l’hôtel... Malgré la distance, la pesanteur des actes et leurs conséquences se fait ressentir. En même temps que son maître est assassiné, le petit chien gratte le long d’une porte avant d’hurler à la mort. Après la séquence du casino qui est comme l’ultime moment de divertissement du film, les personnages se rendent définitivement compte qu’ils ne jouent plus. Hitchcock met en avant une notion fondamentale : on est éloigné du crime qui a lieu hors champ, mais on n’échappe pas à ses conséquences, même pour Ashenden et Elsa. Bien que ces derniers ne se soient pas salis les mains, ils seront beaucoup plus touchés psychologiquement par les évènements : voir, ressentir sans avoir prise sur les choses est le plus dramatique.


  • Express pour l’enfer (Secret Agent)



[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]Une explosion pour un coup de feu.


En lieu et place d’un coup de feu, c’est l’explosion d’une bombe qui va retentir… Ou quand l’extérieur, les grands évènements, le destin historique, se mettent à fonctionner au diapason de tout ce qui a lieu entre les personnages. On a pu parler de l’influence sur ce film du cinéma de montage soviétique et d’Eisenstein… En tout cas la dernière séquence est particulièrement rythmée entre le dénouement du drame humain à l’intérieur du train et le bombardement qui s’apprête à avoir lieu. La métaphore ferroviaire figure l’avancée inéluctable des évènements menée à une vitesse effrénée. Comme dans Sabotage par la suite, l’extérieur inquiétant est tout particulièrement destructeur et tend à signifier qu’on ne peut contrôler une quelconque logique des choses. Comme le bus explosera, le train va lui aussi partir en miettes et l’œuvre de trouver son achèvement dans un final de pure chaos et désolation, dernière touche d’absurde sur une vision bien pessimiste de la réalité politique. Car au fond, ce cinéma de montage vu à la sauce anglaise est détourné avec une ironie et une incision mordante, cruelle… On est proche de la parodie, mais ça n’en reste pas moins diablement efficace et exemplaire. Ce qui est tout de même impressionnant, dans Secret Agent et Sabotage encore une fois, c’est leur manière de regarder le cinéma : on est déjà presque dans une forme de post-modernisme très direct. Hitchcock plus tard signera pourtant d’authentiques œuvres de propagande en temps de guerre et reprendra ces méthodes de façon plus premier degré.






[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]









Une parodie du cinéma de montage soviétique.


  • La mort d’un enfant (Sabotage)

L’étude de cette extraordinaire séquence demanderait l’espace d’un article entier, nous n’allons en synthétiser que quelques aspects... Ce qu’il faut y retenir, c’est surtout une charge très virulente contre une société qui s’est à un tel point surdéveloppée qu’elle génère sa propre destruction. Sabotage est un film très sombre qui parle avant tout sans doute de l’apathie. Autant, voire plus, que le saboteur, c’est toute l’organisation sociale et urbaine anglaise qui est responsable de l’explosion de la bombe que transporte l’enfant, au travers de divers tableaux : la foule impressionnante et étouffante, les vendeurs ambulants, les vitrines, les défilés militaires, les transports en communs et leurs contrôleurs, la régulation de la circulation, les embouteillages… Le petit va rencontrer sur son parcours tous ces obstacles à priori anodins, quotidiens, mais qui ici deviennent instruments de mort. Dans L’homme qui en savait trop seconde version et dans Frenzy, on retrouvera encore cette phobie et cette aversion particulièrement notable pour la vulgarité sociale, la masse. Mais c’est dans cette séquence qu’elle a le plus de force. La dilatation du temps confine ici au cauchemar dans l’art du suspens.



[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]


La masse et la société urbaine, facteurs de son auto-destruction.
La première partie étire ces séquences anodines, en les entrecoupant de cuts et de fondus qui viennent rappeler l’inéluctabilité de l’explosion à 13h45… La dernière partie, une fois que l’enfant est monté dans le bus, accélère le découpage et la nervosité, on sombre alors dans la paranoïa la plus totale avec une accumulation d’inserts sur une musique stressante au possible. Comme dans Secret Agent, un petit chiot plein de douceur est associé à la mort en train d’opérer… On se rend compte en tout cas à quel point les deux montages du film précédent ont bien préparés le terrain de cette pièce maîtresse. L’explosion est immédiatement suivie d’un cut sur un rire des trois personnages principaux, où Sylvia Sidney ne peut s’empêcher toutefois de dessiner sur son visage une grimace alors qu’elle ne sait pas ce qui se passe : là encore la femme porte le poids sur son visage du drame qui vient de se jouer à distance.






  • La mort de Verloc

Si dans les montages précédents on suit un chemin, un parcours avec certaines lignes et orientations bien tracées, celui-ci est plus sourd et psychologique : c’est le trajet que va prendre la lame d’un couteau pour s’enfoncer dans le ventre de sa victime. L’espace est réduit autour d’une table et seul les inserts et gros plans vont se charger de dessiner, rythmer et guider les pulsions de l’héroïne. Cette scène est magnifique par ses non-dits et ses niveaux de lecture. Comme la foule réduisait l’humain en une forme de troupeau particulièrement vulgaire, la nourriture finit de le ramener à ses instincts presque animal, c’est à eux que répondent là encore les personnages. Mais elle est aussi une scène de mort profondément humaine, la plus humaine de toute l’oeuvre. Elle évolue sans qu’on sache vraiment ses limites, entre le meurtre et le suicide, entre la vengeance et la rédemption. Tout se passe dans l’échange de regards, dans cet espace sans mots. Hitchcock fait là encore du pur cinéma. Dans toutes les horreurs vues dans Sabotage, cette mort est le vrai salut, ce qu’il y a finalement de moins monstrueux. Claude Chabrol sur le DVD Zone 2 français tend à affirmer qu’il n’a pas été influencé consciemment par cette séquence pour la fin du Boucher, à chacun de juger ce qu’il en est tant la scène du couteau chez lui ressemble à un très beau détournement de cette séquence. Devant ce couple de fiction, difficile aussi de ne pas penser de façon troublante au couple Alma Reville / Hitchcock qui physiquement ressemble plutôt à celui du film.

[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]Une scène de mort ambiguë et magnifique.

Dans ces deux œuvres anglaises, Alfred Hitchcock montre sa variété de registres possibles, l’étendue des tonalités de sa palette, sa capacité d’aller à l’encontre de certaines conventions narratives ou des attentes du public. Si cela lui a coûté deux succès publics et critiques, il a aussi testé ses limites dans ce qu’il voulait, ce qu’il pensait possible d’offrir à ses spectateurs pour les garder captifs des émotions et idées qu’il désirait leur faire passer sans pour autant que la forme soit rejetée. Ici Hitchcock a voulu aller le plus loin dans sa façon de jouer des archétypes et des clichés (Secret Agent) et dans la noirceur absolue (Sabotage). Aujourd’hui ces deux pépites apparaissent comme à part, des terrains d’expérimentations d’une future méthode presque "scientifique" du suspense, pleine de choix donc qu’il ne refera plus par la suite. Pourtant, en revoyant ces deux films aujourd’hui, ce qui impressionne le plus, outre qu’ils n’ont pas pris une ride, c’est à quel point Hitchcock y parait à l’aise, comme quelqu’un qui parle de façon directe sans s’auto-censurer. Futur génie de l’entertainment, il montrait ici avec beaucoup de lucidité et de modernité pour son époque comment le divertissement qu’il sert est aussi, socialement et individuellement, une arme, un masque ou une fuite : comme les Ashenden qui s’aiment et s’épousent sous leur nom de fiction avec l’illusion de se croire libre… Hitch par la suite se plaira à jouer à cache-cache et à toujours brouiller les pistes, machine Hollywoodienne oblige. C’est de son futur statut que parlent aussi ironiquement ces deux films anglais très avant-gardistes.



[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]
Revenir en haut Aller en bas
 
VHS - Agent secret
Revenir en haut 
Page 1 sur 1

Permission de ce forum:Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum
HALLYDAY PASSION :: AUTRES ARTISTES QUE JOHNNY HALLYDAY :: AUTRES ARTISTES QUE JOHNNY HALLYDAY :: ALFRED HITCHCOCK-
Sauter vers: